Face à l’urgence environnementale, l’ensemble des acteurs de l’industrie énergétique s’engage. Au cœur des enjeux de transformation, la mesure de l’impact sur un plan global. Rencontre avec Anne Gilbert, Chief Innovation Officer pour Total Gas, Renewables and Power.
Depuis 2018, Anne Gilbert est chargée de l’innovation dans la branche Gas, Renewables and Power du groupe Total. Au centre de son action au quotidien : repenser les enjeux de la décarbonation de l’économie, de l’énergie verte, la transformation environnementale et favoriser le développement d’activités multi-énergies. Parallèlement, Anne Gilbert pilote le programme Ecosolutions du groupe Total dont la vocation consiste à réduire les impacts environnementaux des activités de l’entreprise… et par extension de l’ensemble des activités humaines. L’innovation et la R&D sont évidemment les deux principaux moteurs de ce programme. Mais le travail d’Anne Gilbert ne se limite pas au développement de nouvelles solutions. Sa conviction : repenser l’action en ayant à cœur de mesurer les impacts réels…
Mesurer l’impact global : un changement de paradigme
Lorsqu’Anne Gilbert parle de mesurer l’impact de chaque activité, de chaque initiative ou projet, elle n’a pas à l’esprit une notion monolithique. Elle considère bien au contraire, que l’impact uniquement environnementale est trop réducteur. « Il faut raisonner en termes d’impact multicritères ». Au sein du programme Ecosolutions, les équipes travaillent ainsi sur cinq types d’impact au premier rang desquels bien sûr le changement climatique porté par le niveau de CO2. « Si le CO2 est une priorité aujourd’hui, les impacts sur l’eau et sur la biodiversité sont également des critères prioritaires ». Les impacts sur la santé, sur la toxicologie doivent par ailleurs entrer en ligne de compte, de même que l’impact sur les ressources non renouvelables. « Ces impacts ne peuvent pas être opposés. Ils doivent être compris, mesurés, les uns en fonction des autres »
Une perspective globale qui évite qu’une initiative positive par rapport aux émissions de CO2 ait des conséquences néfastes sur l’eau ou la biodiversité. « Il ne faut pas non plus négliger l’impact sociétal que les actions peuvent avoir », continue Anne Gilbert.
Arrêter de compenser mais plutôt repenser
Un impact sociétal si fort que désormais, lorsque le groupe Total s’implante sur un site pour une activité, il ne cherche pas seulement à compenser les impacts de son action, mais à créer des dynamiques vertueuses pour que les sociétés humaines présentes, puissent être valorisées au maximum. « Construire une route, un hôpital… La compensation est rarement suffisante. Désormais, nous faisons en sorte que le sociétal et la façon dont nous interagissons avec les humains présents là où nous travaillons, soient aussi positifs que possible ». Le principe ? Ne pas compenser, mais régénérer pour favoriser la logique d’acceptabilité de notre démarche. « Il faut avoir des discours et des actes qui démontrent la sincérité de notre démarche. Réduire nos impacts, c’est agir en faveur de nos partenaires, de nos clients et penser plus largement ».
Mais rien n’est jamais véritablement neutre et plus la réflexion se prolonge, plus le problème peut sembler insoluble… Mais pas pour Anne Gilbert et ses équipes qui y voient une formidable opportunité d’éco-innover. « La compréhension fine de tous ces impacts, est un moyen de guider nos éco-innovations en allant toujours plus loin ! ».
Relever le défi de l’impossible
Lorsque nous échangeons en visioconférence avec Anne Gilbert, un détail nous interpelle. A l’arrière-plan accroché au mur, un tableau portant un message : « A l’impossible, nul n’est tenu ». Lorsque nous demandons à Anne Gilbert pourquoi ce proverbe trône en bonne place dans l’open space qu’elle occupe avec ses équipes, elle arbore un large sourire et déclare : « Cet aphorisme est important, mais ce qui l’est davantage, c’est l’autre tableau que j’ai installé juste à côté ». Elle désigne alors une affiche : 50 idées pour tout changer et précise sa pensée :
« Face à cet Everest que peut représenter la transformation qui nous attend, vouloir déplacer une montagne relève de l’impossible. En revanche, déplacer caillou après caillou, pierre après pierre, c’est faisable. Mais cela nous oblige à nous inscrire dans une logique d’idéation ».
— Anne Gilbert
Savoir faire preuve d’une exigence autant philosophique, qu’empirique, pragmatique et économique, tels sont, selon Anne Gilbert, les quatre piliers de la transformation dans laquelle l’ensemble des industries doivent désormais s’engager.
Pour en savoir plus et aller plus loin, découvrez cet interview d’Anne Gilbert pour l’Institut de l’Entreprise, dont nous sommes également membres.